Rapports annuels
Avant-propos du président
L’année 2023 a été particulièrement marquée par l'utilisation de sociétés dormantes dans des schémas de blanchiment polycriminel.
En effet, un nombre croissant de dossiers impliquent des sociétés coquilles vides et des individus qui, en échange d'une commission sur leurs « services de blanchiment », usent de leur expertise et de leurs infrastructures pour donner aux activités des criminels une apparence de légitimité, tout en permettant à ces derniers de rester dans l’ombre. Les schémas mis en place par ces « professionnels du blanchiment » reposent sur une constellation de sociétés et de comptes bancaires ainsi qu’un très grand nombre d’hommes de paille et de mules, tant en Belgique qu’à l’étranger, permettant ainsi, à chaque étape, d’opacifier les chaînes de blanchiment.
Le recours à des sociétés écrans ou dormantes constitue un risque majeur identifié au cours de l’évaluation nationale de risque blanchiment, évaluation adoptée au mois de mars dernier par le Comité ministériel de coordination de la lutte contre le blanchiment de capitaux[1]. En vue de prévenir ce risque, certaines mesures, comme la radiation d’un grand nombre de sociétés dormantes de la Banque Carrefour des Entreprises, ont été prises. D’autres mesures sont en cours de préparation.
De par sa situation centrale en Europe, la Belgique a toujours été confrontée au trafic international de stupéfiants et la CTIF a toujours accordé une grande importance à la collaboration avec les autorités et services en charge de lutter contre ce phénomène. Néanmoins celui-ci s’est amplifié au cours de ces dernières années.
Le gouvernement a tout récemment désigné une commissaire nationale aux drogues avec laquelle la CTIF entend partager ses connaissances et expertises.
C’est la raison pour laquelle, j’ai demandé à Madame Ine Van Wymersch, commissaire nationale aux drogues, de bien vouloir préfacer avec moi le rapport d’activités 2023, ce qu’elle a accepté et je l’en remercie.
Une fois de plus, la CTIF a été confrontée à une augmentation du nombre des déclarations reçues. Après avoir franchi la barre de cinquante mille déclarations en 2022, c’est près de quatre-vingt mille déclarations (79.211) qui ont été reçues l’année dernière. 1.316 nouveaux dossiers et plus de mille cinq cents informations utiles ont été communiqués aux autorités judiciaires, aux autorités administratives de l’Etat (CAF, SIRS, SPF Economie, …) et aux autorités de contrôle, en application des articles 83 et 121 de la loi du 18 septembre 2017.
Si dans les relations entre la CTIF et les entités assujetties l’intelligence artificielle prend de plus en plus de place, il est essentiel que l’intervention humaine ne soit pas négligée, au risque de mettre à mal l’esprit de la loi anti-blanchiment qui repose sur une approche subjective des risques.
Je tiens à remercier l’ensemble de nos partenaires (publics et privés) pour l’excellente collaboration et la confiance accordée à la CTIF en 2023.
Je vous souhaite une bonne lecture.
Philippe de Koster
Président de la CTIF
[1] https://www.ctif-cfi.be/index.php/fr/ressources/ml-tf-risk-assessment